La lettre du Refuge (janvier 2022)
Cher.e.s ami.e.s,
J’espère que cette lettre vous trouvera serein, joyeux et audacieux malgré la morosité des temps actuels. Depuis quelques semaines, le Refuge est un peu en hibernation. Quelques soucis de santé m’empêchent de travailler comme je le souhaiterais. Je serai encore forcé au repos un mois ou peut-être plus. Et pourtant les travaux ne manquent pas! Une nouvelle tempête a déraciné une douzaine d’arbres dont un chêne de trente mètres de haut. S’ils ont été débités, il reste encore à nettoyer et évacuer le bois, par exemple. Cela fait quelques stères!
Toujours animés par notre ami maçon, Louis G., les deux chantiers participatifs de l’automne dernier ont été particulièrement fructueux. La façade extérieure nord du bâtiment principal a été entièrement reprise et enduite (du moins l’arrière de la cuisine, de l’entrée et des deux pièces principales). Les murs souffraient vraiment, particulièrement la partie la plus ancienne qui date du 16e siècle ; à l’époque, ils utilisaient de la terre en guise de mortier. Dans l’élan général, Louis a décidé de commencer les travaux dans la seconde pièce au rez-de-chaussée du bâtiment principal. Il a pu piquer et enlever le ciment qui parfois atteignait dix ou quinze centimètres d’épaisseur et mettre à nu les murs d’origine, reprendre un mur qui s’effondrait et faire une première couche d’enduit chaux-sable : un travail impressionnant puisque la pièce fait cinquante mètre carrés avec une hauteur sous plafond de plus de trois mètres. La pièce ne sera cependant pas terminée avant quelques mois. Deux couches d’enduits seront encore nécessaire, mais il faudra également refaire l’intégralité de l’installation électrique ainsi que le plafond. Plusieurs chantiers participatifs auront lieu en 2022, mais les dates n’ont pas encore été fixées avec Louis.
Sous un épais paillis, le potager hiberne également. Il ne reste que les topinambours à récolter (une centaine de kilos). Le bilan de cette seconde année de pratique maraîchère est assez mitigé avec des conditions climatiques peu propices (il a plu de façon continue pendant des mois) et des campagnols particulièrement invasifs. Les premières légumineuses de printemps, fèves et haricots, n’ont quasiment rien produit ; le mildiou a décimé les tomates et les aubergines et nous avons eu très peu de salades, d’épinards, de poivrons, de céleris, de brocolis, de choux-fleurs, de concombres et de courgettes. Par contre les récoltes de pommes de terre, de carottes, de navets, de panais, de daikon et de betterave, de potimarrons et de pâtissons ont été assez conséquentes. La plantation des patates douces a été trop tardive pour produire beaucoup. Nous avons eu des bonnes surprises avec les choux de Bruxelles et surtout avec le soja. Dans la recherche de l’autonomie alimentaire, la production de céréales et de légumineuses est incontournable. J’étais curieux de semer des fèves de soja qui nous avaient été offertes pour la fabrication du tofu. Comme elles avaient déjà plusieurs années, peu ont germées, disons une vingtaine, mais la production des plants a été très généreuse. J’ai soigneusement garder des fèves pour les replanter cette année et augmenter la production. Après avoir abandonné l’idée de semer du sarrasin (on ne peut le décortiquer qu’avec une machine au prix assez prohibitif), je suis curieux de voir ce que donnerait la culture du riz. Je compte faire cette année un essai sur quelques mètres carrés. En Bretagne, un agriculteur s’est lancé avec succès dans la production de riz en zone humide (et non pas en rizière). Et ici, les zones humides ne manquent pas!
Comme les années passées, les retraites se continueront en 2022 la dernière semaine pleine de chaque mois (voir la rubrique agenda sur le site).
Plusieurs d’entre vous le connaissaient. Notre grand ami Bernard D. est décédé à l’âge de quatre-vingt sept ans. Depuis une vingtaine d’années il nous soutenait avec la douceur qui lui était coutumière. Je lui avais donné les préceptes bouddhistes le 8 décembre 2005 et le nom de Seishu, «La main pure». Ces dernières années, son état de santé l’empêchait de se joindre physiquement à nous. Surtout, il regrettait de ne pas connaître le Refuge. Ancien médecin, il savait l’échéance proche. Je l’avais eu au téléphone une dizaine de jours avant son décès. Sa voix était faible, parfois un peu confuse, mais il restait serein face à la mort annoncée qu’il voyait arriver une semaine ou deux plus tard, me disait-il. S’il vous plaît, ayez une pensée pour lui.
Restez courageux, prenez soin de vous, à très vite.
Jiun (Éric Rommeluère)
Photographie : Depuis quelques jours une aigrette a pris ses quartiers d’hiver au Refuge.
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